Notre bureau met de la pression sur le Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MTESS) depuis longtemps en demandant davantage de transparence.
Nous avons mis la main sur un avis juridique transmis aux employés de l’aide sociale suite aux directives que nous donnons à nos clients, notamment celle d’enregistrer une conversation.
Vous pouvez lire ci-dessous l’avis que le Ministère a transmis à ses agents.
Avis juridique sur les enregistrements audio, audiovisuel ou photographie
Au cours des dernières années, plusieurs questions ont été posées au sujet de la captation de la voix ou de l’image d’un employé par un client du Ministère notamment quant au respect de la Loi sur l’accès aux documents et sur la protection des renseignements personnels (Loi sur l’accès). Les employés se demandent s’ils doivent accepter la captation ou s’ils peuvent refuser et les conséquences de l’une ou l’autre de ces options.
Précisons d’emblée que la Loi sur l’accès ne contient pas de dispositions permettant de régler cette question. De plus, à notre connaissance, il existe aucune directive ministérielle sur le sujet. Par ailleurs, quelques avis juridiques ont été émis à l’égard de certains aspects de cette problématique. C’est pourquoi, afin de répondre à vos préoccupations et vous guider dans les décisions à prendre, nous présentons quelques balises ou paramètres quant aux deux situations qui sont le plus souvent portées à notre attention. Ces éléments sont inspirés des avis juridiques émis sur le sujet au cours des dernières années. Cependant, chaque cas demeure un cas d’espèce qui doit être analysé selon le contexte et les circonstances en cause.
Enregistrement audio ou audiovisuel ou photographie sans le consentement de l’employé concerné.
Un client enregistre, filme ou photographie du personnel dans les locaux du MTESS accessible à la clientèle sans avoir demandé la permission au préalable.
A-t-il commis un geste illégal ?
- Selon la jurisprudence ce geste ne serait pas illégal.
Si le client publie ou diffuse la photo ou l’enregistrement ou la vidéo, commet-il un geste illégal ?
- Selon la jurisprudence, il y aurait possiblement atteinte à la vie privée de l’employé, ce qui contrevient à la Charte des droits et libertés de la personne. Par ailleurs, il pourrait y avoir aussi, selon les circonstances (p.ex.: si la photo ou la vidéo est accompagné de commentaires désobligeants), atteinte à la réputation au sens de l’article 4 de la Charte.
S’il y avait diffusion et atteinte à la vie privée, l’employé aurait-il un recours ?
- L’employé pourrait réclamer des dommages et intérêts en intentant une poursuite en responsabilité civile contre l’auteur de la prise d’images ou le diffuseur s’il est en mesure de démontrer le préjudice subi. Cependant, les frais relatifs à cette poursuite devront être assumés par l’employé.
S’il y avait diffusion et atteinte à la vie privée, l’employeur devrait-il agir ?
- L’employeur n’est pas obligé de prendre fait et cause pour l’employé qui déciderait de poursuivre l’auteur de la prise d’images. Cependant, afin d’assurer un environnement de travail sain, le gestionnaire de l’employé peut transmettre une lettre è l’auteur de la diffusion de l’enregistrement pour lui demander d’en retirer la publication. Exceptionnellement, le programme des mesures préventives relatives aux manifestations de violence dans les rapports avec la clientèle externe peut s’appliquer lorsque l’ensemble des circonstances entourant l’enregistrement audio ou audio-vidéo d’un membre du personnel ou la diffusion de son ou des images qui en découle peut-¨tre assimilé à un événement mettant en danger la santé et la sécurité du personnel, comme par exemple une perturbation de l’ordre public, une manœuvre d’intimidation, une menace de violence ou de mort, etc.
Enregistrement audio ou audiovisuel ou photographie avec le consentement de l’employé concerné
Un client demande la permission au préalable ou exige d’enregistrer ou de filmer l’entrevue à laquelle il a été convoqué.
L’employé est-il obligé d’accepter ?
- Le MTESS a le devoir d’agir équitablement envers la clientèle. Cependant, ce devoir ne comprend pas l’obligation d’accepter l’enregistrement de l’entrevue.
L’employé peut-il consentir à l’enregistrement de l’entrevue?
- Sous réserve de l’approbation de son gestionnaire et en fonction du contexte et des circonstances, l’employé pourrait accepter l’enregistrement. Cependant, sur le plan légal, le refus d’offrir un service aux conditions exigées par un client qui insiste pour enregistrer l’entrevue ne contrevient pas au devoir d’agir équitablement. De plus, il serait judicieux que l’employé acceptant d’être enregistré capte aussi la conversation afin de s’assurer que l’enregistrement du client ne sera pas éventuellement altéré ou dénaturé.
Mise en garde pour les prestataires du bien-être social
Il faut être toujours sur ses gardes lorsqu’un agent ou un enquêteur de l’aide sociale vous convoque pour une entrevue. En effet, le but de cette rencontre est habituellement pour accumuler la preuve contre vous en obtenant une déclaration incriminante de votre part.
N’oubliez pas que le droit contre l’auto-incrimination est un droit constitutionnel reconnu dans la Charte et n’hésitez pas à exercer votre droit à l’avocat. Pour plus d’informations, consultez les différents articles suivants:
- L’enquête à l’aide sociale
- Fausse déclaration ou fraude
- Quand l’aide sociale va trop loin
- Quand l’aide sociale n’applique pas la Charte
Pour d’autres questions sur vos droits, contactez Me Lambert pour une consultation juridique.