Vous travaillez comme sauveteur pour une piscine municipale et devez performer une réanimation cardiaque sur un enfant en train de se noyer. En effectuant la manœuvre, vous lui cassez deux côtes. Serez-vous tenu responsable pour les fractures de l’enfant?
Me Lambert analyse la question en expliquant la défense de bon samaritain ainsi que l’obligation de porter secours à autrui.
Qu’est-ce qu’un bon samaritain?
Les origines de l’expression « agir en bon samaritain » remontent jusqu’au Nouveau Testament, où Jésus raconte l’histoire d’un passant qui s’arrête pour venir en aide à un blessé, ayant pour seule motivation la bonne foi d’agir.
Aujourd’hui, cette expression est souvent utilisée pour qualifier le geste de citoyens qui agissent de leur plein gré en décidant de prêter assistance à des gens se trouvant dans des situations difficiles ou encore, de porter secours à autrui.
Venir en aide ou porter secours à autrui
Avez-vous une obligation de venir en aide à une personne se trouvant dans une situation qui met sa vie en danger?
En fait, la Charte des droits et libertés de la personne garantit que tout être humain a le droit au secours lorsque sa vie est en péril. Refuser d’aider une personne dans ce type de situation représente donc un délit et des conséquences légales pourraient s’en suivre.
Et si la vie de l’individu en question n’est pas en péril ou en danger imminent?
La Loi ne vous oblige pas à intervenir dans une situation où les seuls risques constituent des préjudices à l’intégrité physique, sans pour autant porter atteinte à la vie de la personne.
Toutefois, il est important de mentionner que le Gouvernement du Québec encourage ses citoyens à s’entraider, notamment de par l’adoption de la Loi visant à favoriser le civisme et de l’article 1471 de Code civil du Québec qui prévoit une protection pour les gens agissant de bonne foi en venant en aide à leurs concitoyens. Ces mesures seront détaillées un peu plus loin dans l’article à l’aide de dossier tiré de la jurisprudence.
Utilisation de cette défense au niveau légal
Le principal texte de loi sur lequel on se base pour construire ce type de défense est l’article 1471 de Code civil. Ce dernier permet d’exonérer toute personne qui porte secours ou qui dispose gratuitement des biens d’autrui dans le but de l’aider et qui, par la même occasion, cause un préjudice quelconque, aux biens ou encore à la personne secourue.
Prenons l’exemple d’un mécanicien qui est chargé de changer les pneus sur une voiture. En le faisant, celui-ci descend une vitre qui tombe au fond de la porte parce que le système était déficient. Il informe les propriétaires de la voiture et par la suite, tente de remonter la fenêtre, mais elle se coince et se casse. Le mécanicien doit-il payer pour les dommages que le véhicule a subis?
C’est un vrai dossier sur lequel la Cour a dû se pencher et celle-ci a conclu que le mécanicien, malgré le préjudice causé et la faute commise, avait agi de bonne foi, puisque la réparation de la fenêtre ne faisait pas partie de son mandat initial. Il a donc été considéré comme un bon samaritain et a été exonéré de tous les frais de réparation.
Les limitations de cette défense
Il faut par contre souligner qu’afin de réussir votre recours, quelques conditions doivent être remplies.
La première partie de l’article faisait référence la bonne foi qui doit guider et motiver vos actions tout au long de l’intervention. Ce critère implique que votre décision ne pas être motivée par une raison autre que celle de prêter main-forte à la personne dans le besoin. Il implique aussi, et cela va de soi, que la faute ne doit pas être intentionnelle. Le geste ayant causé un préjudice ne doit donc pas être posé dans le but de blesser ou de créer un dommage.
Il est également important de garder en tête que cette défense n’excusera pas tous les types de fautes.
En effet, dans les cas où il s’agit d’une faute lourde, il sera impossible d’obtenir une exonération et vous devrez assumer les frais rattachés à vos actions. Par exemple, si un préjudice grave est causé alors que le sauveteur décide d’agir avec témérité et prend des décisions qui vont au-delà de ces connaissances, le tribunal pourra donc décider qu’une faute lourde a été commise.
Limites à l’obligation de secourir
Lorsque vous décidez de venir en aide à une personne, la loi s’attend à ce que vous agissiez au mieux de vos capacités, tout en respectant vos limites. C’est-à-dire, on s’attend à ce que vous agissiez avec prudence et diligence et avec l’intention claire d’aider à améliorer une situation, ou encore, à en diminuer les dommages qui pourraient découler de celle-ci. Il est cependant souhaitable que vous n’agissiez pas de façon trop intrépide en prenant des décisions drastiques alors que vous n’avez pas les connaissances suffisantes pour le faire.
En fait, lorsque le Tribunal analysera votre dossier, il évaluera si une personne raisonnable placée dans vos souliers aurait réagi de la même façon. Bien entendu, un médecin qui arrête sur le bord de la route et qui fait preuve de négligence en aidant une victime d’accident sera jugé plus sévèrement que si c’était le cas d’un citoyen n’ayant suivi aucune formation de premiers soins.
Indemnité pour le bon samaritain
Avez-vous droit à une indemnité pour les dommages que vous avez subis en portant secours à quelqu’un?
C’est la question qui a été soulevée dans un dossier où une femme s’est interposée entre deux hommes qui se battaient afin qu’ils cessent la bataille. L’intervention de la femme a non seulement donné suite à des dommages matériels causés à la propriété de l’un des deux hommes, mais la femme a aussi subi elle-même des dommages physiques. Dans ce cas, la Cour a condamné les deux hommes à indemniser la femme et à l’exonérée pour ses gestes puisqu’elle a agi conformément à l’article 1471 du Code civil.
De plus, dans la plupart des cas, vous aurez en effet droit au remboursement de vos dommages grâce à la Loi visant à favoriser le civisme. Cette loi vise à prévenir la réticence de secourir une personne dans le besoin que certains citoyens pourraient exprimer par peur de devoir assumer les frais qui découleraient de l’intervention. Pour ce faire, elle offre une indemnisation pour les frais médicaux ainsi que les séquelles qui découleraient de vos préjudices subis. Elle offre également un remboursement pour les pertes matérielles allant jusqu’à 1 000 $. Dans les cas tragiques où le sauveteur perdrait la vie, une indemnité sera versée à la famille du défunt.
La prochaine fois que vous voyez une personne dans le besoin, n’hésitez pas à lui venir en aide. Rappelez-vous que la loi est de votre côté. Cependant, il est crucial de souligner que la loi n’oblige aucun citoyen à mettre sa vie en péril pour venir en secours. Vous n’êtes donc pas dans l’obligation de venir en aide à une personne si la situation présente un risque de préjudice à votre égard ou à celle de vos proches.
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