Vous subissez une intervention chirurgicale à l’abdomen dans un hôpital. Le médecin vous permet de retourner à votre domicile le lendemain. Une fois à la maison, vous ressentez des douleurs au niveau où l’opération a eu lieu. Vous appelez donc votre médecin qui ne répond pas. Vous vous rendez aux urgences et on vous informe que votre abdomen s’est infecté de la bactérie mangeuse de chair parce que le chirurgien n’avait pas stérilisé les instruments.
Quels sont les recours qui s’offrent à vous lorsque vous êtes victime de telles situations ? Le médecin a-t-il agi avec négligence ? Si oui, comment est-il possible de le prouver ?
Me Lambert explique les règles de droit concernant les erreurs chirurgicales et les congés d’hôpital hâtifs à l’aide d’exemples tirés de la jurisprudence.
Éléments de responsabilité civile
Les lecteurs habituels de nos capsules juridiques le savent probablement déjà: pour réussir son recours en responsabilité civile, il faut démontrer avec succès trois éléments importants, soit la faute, le préjudice et le lien de causalité.
Dans les cas de négligence chirurgicale, le préjudice subit sera, la plupart du temps, de nature corporelle et à l’occasion, morale. Afin de démontrer avec succès l’existence et l’étendue des dommages encourus, il est fortement recommandé de recourir à des témoignages et des rapports provenant d’expert. Cela ajoutera de la crédibilité à votre dossier et renforcera vos chances de réussite devant les tribunaux.
Une fois le préjudice établi, il faudra déterminer si le geste du médecin a causé directement les dommages et s’il représente une faute de la part de celui-ci. Il faudra encore une fois avoir recours à des experts, notamment des médecins spécialisés, afin de démontrer ces deux éléments de preuves essentiels.
En ce qui a trait à la faute, il s’agira de voir si le médecin a respecté toutes les obligations auxquelles il est tenu envers le patient. Ces diverses responsabilités sont déterminées par plusieurs lois, notamment par le Code de déontologie des médecins. Les professionnels de la santé sont, entre autres, tenus à une obligation de soigner et à une obligation de suivre. Ces deux obligations représentent des obligations de moyens et non de résultat. Ils ne sont donc pas obligés de garantir la guérison, mais ils doivent tout de même agir avec prudence et raison afin de prendre les meilleurs moyens pour y arriver. Une faute sera alors commise s’il y a un écart marqué entre le comportement d’un médecin raisonnable et de celui faisant l’objet de la poursuite. Un médecin ne verra donc pas sa responsabilité professionnelle engagée si son erreur avait également pu être commise par un de ses confrères prudent et diligent.
Congé hâtif et obligation de suivre
Bien entendu, le chirurgien n’a pas à garantir le succès de la chirurgie. Il doit cependant expliquer les risques auxquels s’exposent le patient, les chances de réussite, les autres traitements possibles, les complications ainsi que les effets secondaires qui pourraient subvenir suite à l’opération. Le but à cette étape est de s’assurer d’informer le patient afin qu’il soit en mesure de donner un consentement éclairé. Ainsi, si une complication divulguée préalablement survient, le patient pourra difficilement se retourner contre le médecin puisqu’il était au courant et avait accepté le risque. Il faudra alors démontrer que la complication fut causée par la négligence ou par l’insouciance du chirurgien.
Une fois l’opération terminée, le médecin a le devoir de conseiller adéquatement le patient sur les mesures à prendre afin d’éviter et prévenir l’apparition de complications postopératoires. Il doit également fournir des informations sur les symptômes avant-coureurs d’effet secondaire qui pourrait nécessiter un suivi plus approfondi.
À cette étape, il est primordial que le patient coopère et suive avec précision les instructions données par le docteur, sinon, on pourrait lui reprocher d’avoir contribué à son préjudice. Ainsi, un médecin pourrait être exonéré si l’infection contractée par le patient est due à sa propre négligence et son omission de prendre les antibiotiques qu’on lui avait prescrits.
Lorsque vient le temps de signer le congé de l’hôpital, le médecin doit s’assurer que l’état du patient est stable et que le reste du traitement peut être administré à domicile de façon sécuritaire. Un congé hâtif de l’hôpital représenterait alors un manquement à l’obligation de suivre et serait susceptible d’engager la responsabilité professionnelle du médecin ou de l’établissement.
Par exemple, dans un dossier, un patient souffrant d’une hernie situé dans sa colonne vertébrale décide de subir une laminectomie, c’est-à-dire, l’ablation partielle d’une vertèbre. Peu de temps après, le patient doit subir une deuxième chirurgie en raison de quelques complications. C’est après cette seconde chirurgie que le médecin commet une faute en envoyant le patient chez lui, seulement 3 jours après l’opération, et ce, sans avoir vérifié l’état de sa colonne vertébrale. Le patient a été victime d’un écrasement vertébrale ce qui le rendit quadriplégique. La preuve a démontré que cela aurait pu être évité si le médecin avait fait preuve de diligence et s’était assuré de la stabilité du patient.
Le médecin doit également demeurer disponible et être attentif aux plaintes des patients. Par exemple, la Cour supérieure condamna un médecin ayant négligé les douleurs rapportées par une patiente. Ce dernier lui faisait répondre par sa réceptionniste et lui déconseillait de se rendre à l’urgence. Son état s’étant dégradé, elle a dû subir une nouvelle chirurgie.
Si vous avez vécu une expérience similaire aux exemples mentionnés, n’hésitez pas à contacter notre cabinet.